Le château sera donc racheté en 1907 par le suisse Charles Berger, le célèbre distillateur d’anis et créateur d’absinthe, la fameuse fée verte très prisée notamment par Baudelaire, Rimbaud ou encore Verlaine. Son élixir a été lancée en 1830 dans le canton de Neufchâtel, mais tout de suite il a dû faire face à la fronde de concurrents, qui dénonçait la toxicité de cette boisson qui affichait tout de même entre 72 et 90 degrés d’alcool ! Bien que l’absinthe ne fut prohibée en suisse seulement qu’à partir de 1910, Charles Berger sentait le vent tourner, et il partira dès 1878, en parallèle de ses activités helvétiques, à Marseille, tenter une nouvelle aventure sur le marché français. Il s’installe à Marseille 15 rue de l’Obélisque (rue Louis Maurel 6ème), puis au 184 boulevard National dans le 3ème. Son absinthe, interdite en France en 1915, évoluera en 1923 en un nouveau spiritueux, fabriqué dans sa nouvelle fabrique du 3 bd Louis Villecroze, pas encore baptisé pastis, cette fois ci légal et toujours anisé, qui fera la fortune de la marque.
Le pastis Berger Blanc sera lancé dès 1933, un an après la création d’un certain Paul Ricard âgé de 23 ans l’inventeur du terme pastis. Une version jaune du Pastis Berger sortira en 1947.
Quant au château il est toujours privé et en parfait état de conservation. Il peut être admiré sur les hauteurs de ce très intéressant parc public. Sur ces terres on trouve les vestiges du mur d’enceinte du domaine, d’anciennes tourelles et vigies, également un kiosque avec un étonnant toit aux mosaïques multicolores et les ruines d’un bunker allemand, en effet ce site offre une vue vraiment spectaculaire sur Marseille et la Méditerranée mais aussi sur un autre château, celui de la Panousse, en contrebas, construit autour de 1870 par le négociant-huilier Joseph Rocca créateur de la célèbre végétaline.
On aperçoit également l’établissement scolaire Pastré Grande Bastide, ouvert dès 1893 par Don Bosco, le fondateur de La congrégation des salésiens, suite au leg de sa propriété par Marie-Amélie Pastré. On confond parfois la Campagne Berger et sa bâtisse avec le Château Berger qui lui est situé sur la corniche près du marégraphe. D’abord nommée La Villa Castellamar elle fut construite vers 1860 pour le Baron Houitte de la Chesnaye dans le style renaissance du Château de Chambord. Il devint ensuite la propriété des marseillais Gassier, repreneurs en 1923 des Pastis Berger et fut ainsi rebaptisée « Château Berger ». On y trouvait les services de la direction générale de Berger et sa Fondation pour la sauvegarde de la nature. Ils quitteront en 1972 la corniche pour la Seine et Marne laissant le château au noviciat des sœurs salésiennes de Don Bosco.
Aujourd’hui, le château Berger est devenu le complexe de thermes marins promicéa et la marque Berger a rejoint le groupe Marie Brizart qui a relancé en 2011 son absinthe mais avec « seulement » 55°, degrés d’alcool.