Le Studio Rex d’Assadour Keussayan, Mémoire de familles, 1933-2018

2 rue Bernard-du-Bois, 13001 Marseille
325
Le Studio Rex d’Assadour Keussayan, Mémoire de familles, 1933-2018
Arrondissement : 1er

Situé de 1933 à 2018 dans la rue Bernard-du-Bois, le studio photo Rex était un lieu chargé d’histoires et récits de traverse remis en lumière par un livre et la superbe exposition « Ne M’oublie pas » des Rencontres Photographiques d’Arles 2023, signée Jean-Marie Donat et Souâd Belhaddad pour les textes. L’adresse marseillaise a été remplacée en 2018 par un magasin d’optique. Une partie de ce fond photo exceptionnel ainsi que du matériel sont également à découvrir au Musée national de l’histoire de l’immigration à Paris. 

Assadour Keussayan (Photo exposée aux Rencontres de la photographie d’Arles 2023)

Selon le cartel de l’exposition « Fondé en 1933 par Assadour Keussayan grâce aux deniers économisés pendant une décennie, ce petit studio d’une trentaine de mètres carrés a accueilli 7 jours sur 7 les clients du quartier populaire de Belsunce dont la plupart étaient, tout comme le photographe arménien, issues d’une histoire de transit et de labeur. Orphelin à 9 ans, rescapé du génocide des Arméniens en Turquie, Assadour Keussayan arrive à l’âge de 17 ans à Marseille, pensant poser un temps ses valises pour mieux rejoindre le rêve américain chez son oncle en Californie. Contrairement à la Syrie et au Liban, où il ne fut que de passage, Marseille deviendra finalement son lieu d’ancrage pérenne. Après plusieurs petits boulots en usine et un apprentissage auprès d’un photographe professionnel, il monte son affaire dans un quartier qui lui est désormais bien familier. C’est au studio que tout commence puisqu’il il y rencontre sa femme Varsenik, elle-même originaire de Chypre, à qui il apprend le métier. Le studio devient famille et l’affaire on ne peut plus familiale, puisque les deux enfants du couple, Grégoire et Germaine, œuvrent rapidement de concert à la petite entreprise du père : l’un au tirage, à la prise de vue et à la colorisation des photographies, l’autre à la retouche minutieuse sur chevalet des imperfections des tirages ou à l’exécution de modifications commandées par les modèles.

Voir ces portraits de famille des acteurs du Studio Rex, c’est assurément lire et comprendre en écho le travail photographique réalisé avec modestie, professionnalisme et justesse par la famille Keussayan, qui connaît elle aussi la teneur des histoires en transit« .

Photos exposées aux Rencontres de la photographie d’Arles 2023

Jean-Marie Donat, né en 1962 à Paris, est un artiste-iconographe, collectionneur de photographie vernaculaire et éditeur de livres de photographie. Il dirige les Éditions Innocences ainsi que l’agence de création éditoriale AllRight. La collection de Jean-Marie Donat constituée sur plus de 30 ans, regroupe plus de 40 000 photographies, ektachromes et négatifs. Elle compte également des cartes postales, et des magazines. Dans un cartel de l’exposition « Ne M’oublie pas » aux Rencontres Photographiques de Arles 2023, il explique le cheminement ayant mené à la réalisation de cette installation « Les visages sont sérieux, les attitudes solennelles et les tenues européennes, une manière de marquer un nouvel ancrage. Ils arrivent d’Afrique du Nord, d’Algérie pour la plupart, d’Afrique subsaharienne mais aussi des Comores.

Leur portrait vient des archives du Studio Rex, un studio photo familial, implanté depuis deux générations à Belsunce et qui a fermé ses portes en 2018.

Photos exposées aux Rencontres de la photographie d’Arles 2023

Dans ce quartier emblématique de Marseille, zone de transit coincée entre la gare et le vieux port, séjournent brièvement les émigrés fraîchement débarqués. Voilà dix ans que je possède ce riche fonds photographique composé de dizaines de milliers d’images prises entre 1966 et 1985. À force de juxtaposer, de sélectionner et d’assembler ces « images-traces » liant l’intime à la preuve historique, il en ressort un travail mémoriel iconographique de grande ampleur, articulé autour de trois typologies de photographies. On trouve quelque 700 photos de portefeuille restées dans la poche en traversant la Méditerranée, utilisées par le studio pour réaliser des montages, mais laissées au Rex suite à un départ précipité après l’annonce d’une embauche tant espérée. Il y a aussi environ 10 000 photos en films négatifs 13×18, originellement destinées à établir des papiers administratifs en France. Et enfin, plus d’une centaine de photos de studio, cette fois vouées à être envoyées au pays pour montrer que la réussite sur cette terre d’accueil est à portée de main. De cette houle cosmopolite, il ne reste ni nom, ni date, ni récit. Mes installations veulent redonner corps à ces personnes invisibilisées par l’Histoire. Grâce à ces photos de la preuve, de la trace et du souvenir, se retisse alors le dialogue entre les deux rives méditerranéennes. Ne m’oublie pas est une passerelle reliant la France à l’Afrique, un pont mémoriel entre le passé et le présent, un voyage – celui du migrant et la photo – qui réhabilite notre mémoire. »

Selon le Musée national de l’histoire de l’immigration « ces photographies coûtaient entre 300 et 400 francs dans les années 1980, une somme élevée qui correspond au nombre d’heures passées sur le cliché. Il est à noter que les tirages présentés ici (au musée) furent conservés par le studio parce que les familles ne sont pas venues les récupérer ».


SOURCES Jean-Marie Donat & Souâd Belhaddad & Musée national de l’histoire de l’immigration & Wikipedia Jean-Marie Donat
PHOTOS Dominique Milherou Tourisme-Marseille.com lors de l’exposition « Ne M’oublie pas » signée Jean-Marie Donat & Google Maps pour la façade du studio Rex en 2014
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