Plaques « Marseille Été 1973 », Crime & Châtiments Racistes

En face du 22 Bd Jardin Zoologique, 13004 Marseille
1983
Sur l’un des murs extérieurs du Parc Longchamp, près de la plaque dédiée à Elie Kakou, on trouve un autre lieu de mémoire, plus sombre, non officiel, posé ici fin 2019 par « Marseille, été 73« . Il tient à remettre en lumière et dans les esprits les très graves et tragiques événements racistes survenus dans la cité phocéenne lors de cette période, avant et à la suite du meurtre de Désiré-Émile Gerlache perpétré ici sur le Bd du Jardin Zoologique. De nombreuses plaques ont ainsi été placées à Marseille et à Aix-en Provence par GoZo (il souhaite rester anonyme) sur les lieux où ont été tués ou mutilés en représailles des hommes originaires d’Afrique du Nord, d’Algérie notamment, dont les noms et lieux de mémoire sont à découvrir en bas de fiche. Ces plaques créées en bois, ne perdureront pas éternellement, mais leurs histoires sont à présent inscrites aussi sur ce site.

On peut y lire avec un jeu de mots graphique composant à la vertical « EN MEMOIRE » ce texte :
« En Août 1973
Notre Ville,
Marseille est
Entachée de
Meurtres
Oubliées.
Ignominie
Raciste
Excusée.

Désiré-Emilie G. Poignardé en ces lieux le 25 août 1972″. Au milieu de la plaque se trouve le revers d’une pièce de monnaie dédiée au Général de Gaulle et la commémoration de la cinquième république. GoZo a pris ce symbole de l’indépendance d’Algérie et y a placé un Zidane contre un Zidane avec son célèbre coup de boule. « le tête a tête apposé sur la pièce représente pour moi des personnes d’une même nation qui s’entretuent » exprime GoZo. L’instigateur du projet est né en 1973, l’année du drame, d’un parent algérien et l’autre français et à découvert les événements grâce a un reportage télévisée, et s’est alors demandé « ce que je pourrais faire pour en parler dans la ville« .

Plaque "Marseille Été 1973", flambée du racismeUne autre petite plaque en bois se trouve en dessous munie d’un QR Code. On peut y lire  » La flambée raciste ou l’été rouge de Marseille reflète une série de violences qui ont eu lieu durant l’été 1973. Série déclenchée par un fait divers au cours duquel un traminot sera assassiné par un passager pris d’un accès de démence. Le passager en question était un immigré algérien. Accentué par le meurtre du traminots marseillais Désiré Émile Gerlache, les crimes racistes avait pourtant débuté dès le 14 août dans notre ville. Durant les 4 mois suivants ce drame des agressions vont prendre pour cible des hommes originaires de l’ancienne colonie partout en France.

Le plasticage du consulat d’Algérie au 28 rue Dieudé à Marseille, revendiquée par le groupe Charles Martel , le 14 décembre 1973 fera 4 morts et 22 blessés (28 selon wikipedia). Il sera considéré comme le dernier événement de cette série de violences ».

Plaque "Marseille Été 1973", flambée du racisme

Hall du Consulat d’Algérie à Marseille après l’attentat

Selon Wikipedia « Dans l’après-midi du 25 août 1973, boulevard Françoise Duparc à Marseille, un Algérien, Salah Bougrine, 35 ans, venu de Nice avec 2 500 francs sur lui, donne l’impression de ne pas vouloir acquitter le montant de sa place en bus. Il finit par payer son ticket et va s’asseoir derrière le conducteur. Quelques secondes après, il se jette sur Désiré-Émile Gerlache (49 ans, père de quatre enfants), conducteur de l’autobus, qu’il poignarde et égorge. Le meurtrier (qui sera reconnu pénalement irresponsable pour troubles mentaux) est finalement maîtrisé par un ancien champion de boxe (Gracieux Lamperti), après avoir blessé cinq voyageurs. Le lendemain, en réaction, Gabriel Domenech, rédacteur en chef du Méridional et futur membre du Front national, écrit dans un éditorial intitulé « Assez, assez, assez ! » : « Assez des voleurs algériens, assez des casseurs algériens, assez des fanfarons algériens, assez des trublions algériens, assez des syphilitiques algériens, assez des violeurs algériens, assez des proxénètes algériens, assez des fous algériens, assez des tueurs algériens. Nous en avons assez de cette immigration sauvage qui amène dans notre pays toute une racaille venue d’outre-Méditerranée […]. » En janvier 1975, Gabriel Domenech est condamné, pour cet article, à 1 500 F d’amende et à payer 1 franc symbolique au MRAP ; le directeur de Minute est également condamné, à 2 000 F d’amende, pour avoir reproduit des extraits de cet éditorial ».

L’éditorial de Gabriel Domenech aurait ainsi mit le feu aux poudres et pendant plusieurs mois, des meurtres vont être commis dans tout le sud de la France.

Plaque "Marseille Été 1973", flambée du racisme

Réaction de la presse algérienne

Selon le Monde du 28 août 1973 « Le meurtre d’un conducteur d’autobus, samedi 25 août, à Marseille, par un ressortissant algérien a immédiatement provoqué de violentes réactions sur place, et en général assez hostiles aux travailleurs nord-africains. Même si des distinguos un peu spécieux sont faits entre les  » bons  » et les  » mauvais « , les réactions ont si vite pris de l’ampleur que l’archevêque de Marseille a publiquement pris position pour mettre en garde la population contre l’utilisation d’un fait divers dramatique mais isolé. Une information judiciaire a été confiée à M. Louis Di Guardia, juge d’instruction. De fait, ce meurtre est commis alors que des flambées de violence souvent imprégnées de racisme sont observées sur tous les points de la Côte d’Azur, comme nous l’indique notre correspondant ».

Lire l’article complet.

La Provence

Selon Wikipedia « Les ratonnades de 1973 sont ainsi une vague de violences racistes envers les Algériens perpétrées en France, principalement à Grasse et Marseille, pendant l’été et l’automne 1973. Selon l’ambassade d’Algérie en France, ces violences ont fait 50 morts algériens et 300 blessés. Les organisations de travailleurs nord-africains font quant à elles état d’une douzaine de morts en sus des quatre victimes de l’attentat du 14 décembre contre le consulat d’Algérie à Marseille. La sociologue Rachida Brahim a décompté 16 assassinats de Nord-africains en 1973 dans la cité phocéenne mais la plupart des assassins n’ont pas été identifiés. Ces événements interviennent onze ans après la fin de la guerre d’Algérie et lors du premier choc pétrolier. Face aux difficultés économiques, le gouvernement Pierre Messmer, sous la présidence Pompidou, adopte la circulaire Marcellin-Fontanet, qui limite l’immigration en France. La population française est alors divisée sur la question de l’immigration. En septembre 1972, un mouvement de protestation à la circulaire se met en place pour soutenir les immigrés en situation irrégulière par des grèves, dont des grèves de la faim. La contestation est forte à Valence, et plusieurs églises de la Drôme annulent, en signe de solidarité, la messe de Noël. La question de l’immigration entre dans l’actualité et, en juin 1973, la circulaire Fontanet est assouplie.

Affiche du film « Marseille 73 : la ratonnade oubliée »

Un « Comité de défense des Marseillais » se constitue pour « assurer la sécurité des Français » ; il s’installe dans les locaux du Front national de Marseille. M. Pujol, député suppléant, déclare alors : « Les immigrés finissent par croire qu’ils sont chez eux […]. Ils sont à la charge du contribuable français. » Malgré l’appel au calme de l’archevêque de Marseille, Roger Etchegaray, diffusé au journal de 20 heures, des violences s’ensuivent. Dans la nuit du 27 au 28 août, 50 « paras » du 9e régiment organisent une ratonnade à Toulouse, qui fait plusieurs blessés. Le journal Le Monde du 30 août évoque une « expédition punitive » menée à la suite d’une bagarre survenue lors d’un bal le dimanche précédent, au cours de laquelle deux militaires ont été blessés. En dépit du fait que le 9e RCP a été aussitôt consigné, une cinquantaine de paras ont réussi à faire le mur et agressent plusieurs Nord-Africains. L’un d’entre eux sera hospitalisé. Les cinquante soldats qui ont pris part à l’expédition ont été envoyés en manœuvres spéciales à titre disciplinaire8. Dans la nuit du 28 au 29 août, un Algérien est abattu à la sortie d’un café et un cocktail Molotov est jeté dans une entreprise de la Ciotat, où travaillent majoritairement des Algériens. Le Mouvement des travailleurs arabes réagit en lançant un appel à la grève générale contre le racisme pour le 3 septembre 1973. Il est suivi par 20 000 personnes à Marseille et dans la région.

Le 4 septembre 1973, le gouvernement expulse le pasteur suisse Berthier-Perregaux, représentant à Marseille de l’association d’aide aux migrants la CIMADE. Le Monde parle de décision « arbitraire », tandis que L’Aurore évoque une « provocation ».

Houari Boumédienne

En Algérie, le président, Houari Boumédienne, suspend l’émigration algérienne vers la France et critique la passivité des autorités françaises. L’ambassadeur algérien en France dénonce également la complaisance du maire de Marseille, Gaston Defferre, et l’inaction de la police. Le président français Georges Pompidou déclare le 27 septembre 1973 : « La France est profondément antiraciste. […] En France, de racisme il n’y en a pas, en tout cas il ne doit pas y en avoir. » Toutefois, l’attitude du gouvernement est critiquée. Le Monde parle notamment d’indifférence. Le 14 décembre 1973, un attentat au consulat d’Algérie de Marseille fait quatre morts et vingt blessés. L’attentat est revendiqué par le groupe Charles-Martel composé d’anciens de l’OAS et de nostalgiques de l’Algérie française. Fin décembre, plusieurs autres victimes algériennes sont ciblées, avec un mort à Izeron (Isère) le 25. Ces événements de 1973 servent de toile de fond détaillée à la romancière et historienne Dominique Manotti pour son roman Marseille 73, publié en 2020 aux éditions Les Arènes, ainsi qu’au film Dupont Lajoie d’Yves Boisset, sorti en 1975 et au film documentaire de 2009 « Marseille 73 : la ratonnade oubliée »

D’autres plaques « Mémoires – « Marseille été 73″ » ont été placées par GoZo à Marseille et Aix en Provence comme à la Traverse Courtes où a été tué par balle Achene Idjeri le 14 août 1973, une Bd Bernardo où Youcef Meki a été frappé à mort le 18 août 1973, une (vite arrachée) Chemin de la Nerthe où a été tué par balle Rachid Mouka le 24 août 1973, ou encore celle dédiée à Abdelouab Hemaham frappé à mort Quai de Rive Neuve, une dédiée à Saïd Aounallah, tué par balles Bd Plombière le 26 août 1973. Une plaque à Aix en Provence rend hommage à Hammou Mebarki ayant subi une agression le même jour. Une autre se trouve Bd Paumont à Marseille dédiée à Lounés Ladj tué par balle le 26 août 1973, une autre se trouve près de l’ancien bidonville du Grand Champ à L’Estaque, où Said Ghilas a eu le crane fracassé le 29 août 1973. Une autre plaque, arrachée, se trouvait rue du Saule à Marseille où fut blessé Bensaha Mekernef le 30 août 1973, une autre aussi arrachée était présente rue de la Mairie, où Mohand Benborek fut frappé et jeté dans le Vieux Port, attaché à ses pieds une pierre de 7 kilos le 30 août 1973.


SOURCES Texte de la plaque & Wikipedia Attentat contre le consulat d’Algérie à Marseille & Le Monde 28 août 1973 & Wikipedia Agressions racistes de 1973 en France & Marseille été 73 GoZo
PHOTOS Dominique Milherou Tourisme-marseille.com & cmca-med.org & Affiche du film « Marseille 73 : la ratonnade oubliée » & Portrait non créditée de Houari Boumédienne & Extrait la Provence
A NOTER Ce site est un blog personnel, ces informations sont données à titre indicatif et sont mises à jour aussi souvent que possible. N’hésitez pas à me contacter pour toute correction ou contribution

Avis sur cette fiche
Il n'y a pas encore d'avis sur cette fiche, soyez le premier !
Laisser un avis
VOTRE NOTE:
D'autres fiches à explorer dans cette catégorie