L’acide tartrique produite à l’époque par l’usine était fabriquée à partir de résidus de moûts pressés des caves coopératives. Il se présentait une fois usiné sous forme de granulés. L’acide tartrique a la propriété de faire saliver, il est même laxatif et diurétique, il est naturellement présent dans le raisin et dans le vin.
Usages de l’acide tartrique
– acide des comprimés effervescents
– vinification de raisins pauvres en cet acide, comme les raisins trop mûrs.
– acide des jus de fruits, des sodas et autres boissons gazeuses
– stabilisant du goût et de la couleurs des produits mis en conserves
– dans la métallurgie, mélangé à d’autres produits pour polir et nettoyer les métaux
– chez les cimentiers, l’acide tartrique est un retardateur de la prise des ciments et des plâtres
Au dessus de l’usine Legré Mante, montant raide sur les flancs du massif des Calanques, sur plus de 500 mètres de long, se trouve un immense conduit de cheminée bâti à même le sol, assez haut pour que l’on puisse y marcher droit, ajouré sur ses flancs d’ouvertures voûtées (mais attention ce site est très toxique). L’usine fabriquait à l’origine du plomb, et cette cheminée servait à évacuer l’énorme foyer de chaleur. Sa fonction principale était d’éloigner les émanations lourdement polluantes et à en retenir une partie, comme en témoignent les couches d’éléments chimiques toxiques qui en tapissent les parois intérieures.
Evidemment, cet ancien ouvrage est aujourd’hui très pollué, selon un rapport d’un technicien supérieur de l’Industrie et des Mines, les sols contiennent jusqu’à 74 500 mg de plomb par kg, jusqu’à 8 000 mg d’arsenic par kg et jusqu’à 180 mg de cadmium par kg.
Liquidation et Vente
Selon La Provence, les salariés de l’usine en sont convaincus, le P-DG aurait laissé se dégrader l’usine afin de pouvoir, le moment venu, arguer de son manque de rentabilité pour la liquider et réaliser une fructueuse opération immobilière estimée à plus de 42 millions d’euros, en effet l’usine possède dix-sept hectares au pied des collines avec vue sur la mer.
Le 6 juillet 2009, trois jours après avoir arrêté la production, la direction se met en cessation de paiement et dit à ses 48 salariés de rentrer chez eux. Le 24, le Tribunal de commerce prononce la liquidation judiciaire. Aucun plan social n’est conduit. Les salariés sont alors à la rue.
L’avenir du site ? Un dossier toxique et très complexe !
Cette usine devait être transformée en résidence de luxe par le promoteur Océanis, avec d’un côté 285 appartements de standing et, de l’autre, une trentaine de villas.
Mais face à une très vive opposition des habitants fin 2014 le promoteur dit avoir pris acte des réticences de la population. « Cette pause débouchera sans doute sur un permis reconfiguré. On l’ajustera en fonction de l’évolution des choses mais ni le projet, ni la dépollution du site ne sont remis en cause« .
Le site Legré Mante a fait l’objet de deux permis de construire (sans compter les permis modificatifs) tous attaqués. Les habitants remettant en cause l’importance des constructions et le manque d’équipement (routes, assainissement) du quartier.
La justice a retoqué le projet de construction de six immeubles en octobre 2016. La cour administrative d’appel de Marseille a rejeté la requête du promoteur Océanis qui avait vu son permis de construire annulé en 2013. La justice estime que le projet prévu enfreint la loi sur le littoral.
En janvier 2017 des travaux ont pourtant démarré pour construire les 6 villas “maisons du pêcheur” du projet Cap Marin sur une parcelle annexe de 24 000 m3 de l’usine, directement en bordure de mer, là même où l’on entreposait depuis 1873 les résidus et les déchets de production. Selon l’association Sud Littoral il s’agissait de mâchefers et cendres de combustion des fours de la fonderie contenant des métaux lourds puis de résidus de la fabrique d’acide tartrique !
En août 2017, on apprenait qu’un nouvel acteur, Ginkgo, un groupe suisse spécialisé dans la dépollution de friches industrielles reprenait le dossier, après l’abandon du promoteur qui prévoyait, la construction de plusieurs centaines de logements sur le site de l’usine. En juin 2018 le fond d’investissement suisse présentait son projet aux habitants du quartier : « Rendre l’accès à la mer, préserver le patrimoine, ne pas aggraver la situation actuelle, étendre le noyau villageois, recréer du lien avec les calanques, traiter la pollution. »
Un permis de construire a été déposé en décembre 2019 pour le projet baptisé 195 La Calanque : 95 logements de résidence, et 105 logements de tourisme en réhabilitant 85 % des bâtiments existants ainsi valorisés. S’ajouteront 1 877 m2 de de commerces de proximité ainsi que 64 “chambres senior”. Le groupe promet ainsi la création de 125 emplois ainsi que de rendre 5 des 8 hectares au Parc national des Calanques.
En 2021 Ginkgo sollicitait le plan de relance pour dépolluer Legré-Mante et bâtir 142 logements dont 40 sociaux, une résidence seniors, une de tourisme, des équipements publics, des commerces et un parking de 468 places. Le chantier devrait commencer au quatrième trimestre 2023…mais fin 2022 un avis favorable assorti d’importantes réserves a été rendu sur ce long dossier très toxique ! Au final en janvier 2023 le permis de construire est enfin accordé…Nouveau rebondissement en juillet 2024, le tribunal a annulé le permis de la mairie pour le projet !