Claude François Deidier de Curiol, trésorier de la généralité de Provence, possédait des terrains en dehors des remparts, à proximité de la porte Noailles. Ses enfants vendent à la ville les parcelles où seront établies les allées de Meilhan (actuellement partie haute de la Canebière) et ouvrent sur les terrains dont ils sont restés propriétaires, une rue qui portera leur nom. Elle reliait la Plaine jusqu’en 1928 avant que le dernier tronçon ne prennent le nom de la rue Thiers parallèle. Avant cela, en 1911 s’ouvre aux n° 8 à 12 sur l’emplacement de la fabrique de bière J.A Borel fondée au 19ème siècle, le théatre Apollo qui deviendra par la suite le Théatre du Châtelet, puis le Capitole avant de devenir une résidence hôtelière. Au n°25 on trouvait l’un des premiers sièges du Thé de l’éléphant !
L’artère est aujourd’hui un lieu phare de la prostitution à Marseille suite notamment à la destruction en 1943 du Secteur Réservé, le quartier de prostitution légale de la ville de Marseille et ses 60 « professionnelles » référencées ! Dans les années 50, la rue Sénac commence à devenir un rendez vous des homosexuels et travestis.
Coccinelle
Au n°8, au bar Mistral, une grande photo de Coccinelle trônait derrière le comptoir. Coccinelle était le nom de scène de Jacqueline Charlotte Dufresnoy, née le 23 août 1931 à Paris et morte le 9 octobre 2006 à Marseille, l’artiste était à la fois danseuse, chanteuse et actrice transgenre. Elle vit ses dernières années entre le Cabaret LouLou à Marseille, où elle suit les auditions d’artistes régionaux et son passe temps favori : la plage ! Coccinelle meurt d’un arrêt cardiaque à l’hôpital de la Timone. Conformément à ses dernières volontés, elle est discrètement incinérée et ses cendres répandues dans un lieu tenu secret. Elle aurait déclaré à ses proches : « Je n’ai pas eu ma vie, qu’on me laisse au moins ma mort. ». La célèbre Bambi était aussi une des déesses adulées de cette artère. Bambi était le nom de scène de Marie-Pierre Pruvot, une femme trans, à l’origine Jean-Pierre Pruvot, née le 11 novembre 1935, aux Issers en Algérie, qui a été meneuse de revue transgenre dans les années 1950 et 1960, puis, après avoir repris ses études, est devenue professeure de Lettres modernes en 1974, avant de se consacrer à l’écriture d’autofiction. C’est probablement sur ces bases que s’est développée l’activité actuelle, filmée par Julian Ballester dans son documentaire Rue Curiol de 2014. A découvrir également le portrait de Touria, travailleuse de la rue Curiol, réalisé par TV5 Monde en 2018. Dans les curiosités de la rue on trouve encore l’enseigne très ancienne de l’hôtel Franco Britanic au n°13, le bar à hôtesses l’Eden, la devanture du Ciné Café ou de l’Odéon, ou l’angle de la Librairie Maupetit fondée en 1919…quant au n°34 de la rue, il fut vu ici le dernier geste du célèbre mime Louis Rouffe.
En juillet 2019, quelques mois après l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne, une dizaine d’immeubles de la rue Curiol sont évacués dans la plus grande confusion : une expulsion a lieu sans décision de justice, sans relogement des personnes délogées, et l’immeuble est saccagé par le bailleur Marseille Habitat pour décourager les retours. En réaction, les membres du collectif 5 novembre occupent les locaux de Marseille Habitat, l’un d’eux est placé en garde à vue. Fin 2019, les numéros 81 et 83 menaçaient de s’effondrer.
