![Fontaine d’Ivoire, La Légende de Gyptis & Protis](https://tourisme-marseille.com/wp-content/uploads/2015/08/fontaine-d-ivoire-marseille-5.jpg)
Si la légende de Fontaine d’ivoire est donc née, comme la ville, il y a 2 600 ans, son nom actuel est bien plus récent. Le véritable nom du lieu est la Fontaine de Voire, nom d’un ancien propriétaire qui avait là une habitation dont les ruines existent encore. La légende de Gyptis et Protis est le mythe fondateur qui raconte la fondation légendaire de Marseille vers 600 av. J.-C. par des colons grecs venus de la cité de Phocée en Ionie. Le mythe existe au moins dès le ve siècle av. J.-C. puisqu’Antiochos de Syracuse le mentionne. Mais nous ne disposons désormais que de deux sources principales : l’histoire décrite par Aristote dans « La Constitution des Massaliotes », la plus ancienne, et celle de Trogue Pompée dans son Histoires philippiques, aujourd’hui perdue mais résumée par le romain Justin.
Si les deux versions présentent quelques différences, elles racontent toutes deux le mariage de Gyptis (ou Petta), fille du chef des autochtones, avec Protis (ou Euxène), un marin originaire de Phocée. Lors de ses noces, la princesse choisit alors d’épouser l’étranger en lui présentant une coupe emplie d’eau au cours d’un repas.
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Gyptis et Protis (1874) par Joanny Rave
Le mariage du chef des colons avec la fille du souverain local reflète les rapports pacifiques qu’ont voulu entretenir les Phocéens avec les autochtones, contrairement à d’autres colonies où ils s’emparent du territoire par la force ou la ruse. Les marins cherchent à commercer avec eux et s’installer durablement et pacifiquement sur leur territoire. Grâce à la force créatrice du mythe, descendants de colons et d’indigènes se dessinent une origine commune dans leur mémoire collective. D’ailleurs, quand Euxénos prend Petta pour femme, Aristote en parle en utilisant le verbe συνοικείν (« cohabiter »), qui peut servir à désigner la cohabitation de deux personnes, mais aussi de deux groupes. Et lorsque celle-ci épouse Eúxenos (Εὔξενος, « le bon hôte »), il fait changer son nom en Aristoxénè (Αριστοξενη, « la meilleure des hôtesses »).
Le mariage de Protis et de la fille du roi symboliserait donc l’alliance des deux peuples, où l’étranger se fond parmi les indigènes. Prôtis « d’hôte devient gendre » nous dit d’ailleurs Trogue Pompée. On pourrait aussi y voir la volonté des Phocéens de s’approprier l’identité des autochtones dès le début, ou bien au contraire de conduire à leur hellénisation. Le recours aux mariages mixtes est en outre nécessaire et courant dans les premiers temps de la colonisation.
Selon le Parc National des Calanques de Marseille, le chemin qui mène à la fontaine de Voire réserve plusieurs surprises au visiteur. Dans le vallon de la Jarre se situe d’abord une curiosité naturelle : des dunes de sable en plein milieu des collines… Ce sable a probablement été transporté par le vent depuis les nombreuses plages de Marseille, avant qu’elles ne soient urbanisées. Il est très fragile et recèle des espèces végétales rares : il ne doit pas être piétiné. On peut aussi voir une très belle forêt de pins d’Alep centenaires, de chênes kermès, de bruyères arborescentes et multiflores, de lentisques, de cistes cotonneux et de Montpellier, de cade, de baouque, de lys des sables ou encore de salsepareille.
Dans ce secteur, on trouve également les vestiges d’une carrière, ainsi que d’anciens fours à chaux. Dans cette propriété qui appartenait à un certain docteur Voire étaient aussi bâties une maison et une bergerie, dont il reste quelques traces. La fontaine a d’ailleurs porté plusieurs noms fautifs : fontaine de Voyre ou d’Ivoire notamment. Mais c’est bien ce médecin qui lui a laissé son nom.
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