Le Grand Saint Antoine était une flûte, un voilier trois-mâts carré, de fabrication hollandaise partie de Marseille le 22 juillet 1719 pour la Syrie où sévissait alors la peste. Sa cargaison, d’une valeur de 100 000 écus et composée essentiellement d’étoffes précieuses, était porteuse de la bactérie Yersinia pestis de la peste. Le 3 avril 1720, un passager turc embarqué à Tripoli meurt. Sur le chemin du retour, le vaisseau perd successivement sept matelots et le chirurgien de bord. Un huitième matelot tombe malade peu avant l’arrivée à Livourne, en Italie. La négligence supposée des médecins italiens, qui laissent repartir le navire, jointe à la hâte du capitaine Jean-Baptiste Chataud pour livrer avant le début de la foire de Beaucaire, n’arrange rien à l’affaire : le capitaine amarre son voilier près de Marseille, au Brusc, et fait discrètement prévenir les armateurs du navire. Les propriétaires font alors jouer leurs relations et intervenir les échevins de Marseille pour éviter la grande quarantaine (celle durant quarante jours).
Tout le monde considère que la peste est « une histoire du passé » et l’affaire est prise avec détachement : les autorités marseillaises demandent simplement au capitaine de repartir à Livourne chercher une « patente nette », certificat attestant que tout va bien à bord.
Les autorités de Livourne, qui n’ont pas envie de s’encombrer du navire, ne font pas de difficultés pour délivrer le dit certificat. C’est ainsi que le Grand-Saint-Antoine parvint à Marseille le 25 mai. Il mouilla à Pomègues près de l’infirmerie jusqu’au 4 juin ; et il fut alors autorisé à se rapprocher des infirmeries d’Arenc pour y débarquer passagers et marchandises en vue d’une petite quarantaine, puis il fut finalement placé en quarantaine à l’île Jarre le 27 juin 1720.
L’ordre donné, le 28 juillet, par le Régent Philippe d’Orléans de brûler le navire et sa cargaison ne fut exécuté que les 25 et 26 septembre 1720 et la peste eut le temps de s’étendre jusqu’en Provence. Elle fut même signalée dans la région d’Apt en septembre de la même année. Elle ne fut totalement éradiquée qu’en janvier 1723.
Une association de plongée sous-marine, l’A.R.H.A., ménée par C. Barsacq et D. Mouyssinat, a retrouvé l’épave calcinée du navire en 1978. Les vestiges archéologiques alors remontés et exposés au musée de l’hôpital Caroline sur l’ile de Ratonneau. L’ancre découverte sur le site du Grand Saint-Antoine a été sortie le 14 septembre 2012 du bassin de l’INPP à la Pointe Rouge où elle était conservée depuis les fouilles réalisée par Michel Goury, plongeur, archéologue en 1982. L’ancre bénéficiera ensuite d’un traitement dans le laboratoire A-Corros à Arles experte en corrosion marine. La Caisse d’Épargne a financé les 30 000 euros nécessaires à l’opération de conservation et d’exposition. L’ancre est à présent exposée depuis le 4 avril 2016 au Musée d’Histoire de Marseille.
L’étude de cette ancre de l’épave a été menée par l’ARHA (Association de Recherches Historiques et Archéologiques) dirigée par M. Goury. L’ancre, en fer, pèse près d’1 tonne. Sa verge mesure 3,80 m et la longueur de ses pattes et de 2,50m.