Chapellerie Bruyas, Troix-Six, 1880

35 Cours Belsunce, 13001 Marseille
67
Chapellerie Bruyas, Troix-Six, 1880
Arrondissement : 1er

Au 35 Cours Belsunce, un temps l’un des plus prestigieux au monde, rien ne rappelle aujourd’hui à cette adresse dotée d’un bâtiment contemporain que se trouvait ici fin 19ème début 20ème la Chapellerie Troix-Six, gérée par les établissements Bruyas, fondée en 1880, en succédant à l’enseigne de la Veuve Vaudreuil. L’appellation «Trois-Six» ? Cette expression ancienne indiquait familièrement aux passants que l’on y trouvait une gamme d’un coût variant entre trois et six francs. Une chapellerie Bruyas existe encore à Dijon ou Angoulême au moment d’écrire ces lignes.

Patrick Boulanger, conservateur du Musée de l’économie et de la marine et des collections de la CCIMP a écrit un texte présentant cette chapellerie : « Alors que la confection à Marseille des bonnets, notamment ceux en laine «à la façon de Tunis» pour l’exportation dans le vaste empire ottoman était ancienne, la fabrication des chapeaux, figurant parmi les produits les plus réputés de la cité portuaire au XVIIIe siècle, destinés aux îles françaises de l’Amérique, surtout à Saint-Domingue qui les redistribuait dans les colonies espagnoles des Caraïbes, ne s’y pratiquait plus guère. On se contentait désormais de faire l’«appropriage» des «cloches» teintes et façonnées par d’autres centres, selon les modèles en vogue. En revanche, les chapeaux de paille façon canotier ou panama furent produits avec succès à la Belle Epoque dans plusieurs manufactures marseillaises, de même que les casques coloniaux dits «insolaires» destinés aux régions intertropicales. Une autre industrie ancienne restait des plus vivantes, celle des casquettes pour les uniformes de la marine et des administrations qui devinrent la coiffure des classes laborieuses. A proximité de Marseille, Aix excellait dans les chapeaux en poil souple et mérinos, mais on ne sut pas imposer l’emploi des machines aux ouvriers habitués à travailler manuellement, alors qu’à l’Exposition Universelle de 1900 avaient déjà été présentés des modèles réalisant l’exécution complète de couvre-chefs en feutre. Si le nombre d’exemplaires fabriqués diminuait d’année en année, on affirmait pourtant que la qualité avait remplacé la quantité. Il ne faut donc pas s’étonner de voir les Etablissements Bruyas installés à Givors dans le Rhône ouvrir une boutique pour diffuser leur production et se rapprocher d’une clientèle internationale à Marseille, seconde ville et premier port de France, en succédant à l’enseigne de la Veuve Vaudreuil au 35, cours Belsunce. La chapellerie Bruyas fut placée sous l’appellation «Trois-Six», une expression ancienne indiquant familièrement aux passants que l’on y trouvait une gamme d’un coût variant entre trois et six francs, pour la ville, le voyage ou les cérémonies, en vente directe comme cela était spécifié, sans intermédiaires renchérissant les prix.

Pour faire connaître ce magasin face à la concurrence (on dénombrait en effet pas moins de quatre autres chapeliers sur le cours Belsunce et six dans son prolongement, la rue d’Aix), une grande affiche horizontale réalisée par un artiste resté anonyme montra les productions Bruyas sous un jour qui se voulait humoristique. Telle l’assistante d’un prestidigitateur, une jeune femme vêtue d’une robe à traîne a entrouvert une caissette d’osier d’où s’échappent ses lapins blancs, ressortant quasiment tous d’une machine, comme par magie, leurs poils transformés en gibus, melons et huit-reflets pour parfaire l’élégance masculine ! Afin d’affirmer mieux encore l’importance des productions Bruyas, la quinzaine de villes où l’on pouvait acquérir pareil assortiment de chapeaux à la mode était mentionnée, l’ensemble étant entouré de motifs floraux, bien dans l’esprit Art Nouveau, que d’aucuns qualifièrent de Style Nouille, courant jusqu’à la Grande Guerre qui devait l’emporter. Mais dans les semaines précédant l’attentat de Sarajevo, nombre de Marseillais qui souhaitaient se mettre sur leur «trente et un» continuaient à passer, l’esprit serein, par la boutique «Trois-Six» ».


SOURCES Patrick Boulanger, conservateur du Musée de l’économie et de la marine et des collections de la CCIMP & madeinmarseilleprovence.tumblr.com/histoire
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