
Depuis 1982, Radio GALERE (à l’origine, Groupement Associatif pour la Liberté d’Expression Radiophonique) est une radio libre, non-commerciale, indépendante de tout parti, religion ou obédience. Elle émet depuis la Friche de la Belle de Mai, à Marseille et alentours, sur le 88.4 FM et en DAB+ (Radio Numérique Terrestre), en streaming sur radiogalere.org.
Radio Galère, ce sont des infos, des reportages, des émissions thématiques, des émissions musicales, des ateliers pédagogiques et des plateaux hors les murs. Bien connue des Marseillaises et Marseillais, Radio Galère est ouverte à qui veut s’y investir, dans l’état d’esprit de la radio et le respect de sa charte. La radio met en place les conditions pour que se fassent entendre les contestations et les luttes émancipatrices. Les animateur.ices.s invitent des personne engagées dans des luttes à venir débattre, discuter, élaborer des pratiques horizontales. Un de nos buts communs est que soient dénoncées toutes les injustices et discriminations présentes à tous les niveaux de notre société. Lieu d’expression, Radio Galère est aussi un canal de production, d’alimentation et de diffusion des cultures populaires, qu’elles soient marseillaises, méditerranéennes… ou d’ailleurs ! Avant tout, c’est une poignée de permanent.e.s salarié.e.s et une centaines de personne engagé.e.s et passionné.e.s.qui produisent, animent et réalisent des émissions sur des ondes libres et associative.
Il est possible de s’investir dans la vie associative de la radio en proposant une émission régulière, en aidant à préparer un événement musical ou militant… Le mieux, c’est de pousser la porte de nos locaux. Le conseil d’administration est ouvert à toutes et tous les deuxième lundi du mois à 19h.
Historique complet issu du site de la radio
Au commencement était le béton
A la fin des années 70 n’existait sur la bande FM que des radios publique d’État ou des radios privées financées par des entreprises privées émettant de l’étranger (RMC, RTL …). Les auditeur·ice·s n’avaient pas d’autre choix que d’écouter des radios aux ordres du pouvoir ou soumis au lobbying du monde marchand. À la fin des années 70, un peu partout en France, des militant·e·s progressistes de tout bord (syndicalistes, personnes issues de l’immigration, écologistes, féministes, défenseur·euse·s des droits, LGBTQI, personnes en situation de handicap) ont décidé qu’il était temps de « donner la parole à celles et ceux qui ne l’ont pas ». Et pas seulement dans l’hexagone mais que des voix résonnent d’un peu partout dans le monde, notamment des anciennes colonies.
C’est à ce moment-là que sont apparus ce que le gouvernement giscardien de l’époque appelait les fameuses « Radios Pirates ». À Marseille, une des premières radios qui a osé squatter les ondes FM pour proposer d’autres voix et d’autres points de vue fut « Radio Béton » avec comme slogan « le béton est armé, pourquoi pas nous ». Elle fit son apparition en 1979, comme Radio Provisoire. Ses prises d’antennes étaient ponctuelles car c’était surtout le jeu du chat et de la souris avec la police. Les animateur·ice·s diffusaient de local en local, ou dans des véhicules pour échapper à la police. On a même pu voir, un émetteur se faire trimbaler sur une mobylette. Les émissions était préenregistrées sur des cassettes.
On ne peut pas dire, vu les conditions matérielles, que la diffusion était régulière et que beaucoup de marseillais·e·s ait pu écouter les émissions. Mais l’objectif toutefois était atteint sur le plan de la symbolique car pour la première fois des « pirates des ondes » osaient braver le monopole de l’information au nez et à la barbe des autorités.
Un provisoire qui va finalement durer
10 mai 1981 : Mitterrand est élu. Il incarnait pour beaucoup l’espoir d’un changement social vers plus d’égalité et d’émancipation qui hélas ont été assez vite dissoutes dans un tournant libéral. Toutefois, au moins une promesse a été tenue, celle de « libéraliser » les ondes afin d’avoir une diversités de médias et d’opinions. Le président a fait mettre en place une instance d’état (le CSA) pour chapeauter ces nouvelles radios dites « libres ». La loi autorisait désormais les radios locales à émettre sur la bande FM. De nombreuses stations de radios ont profité de cette occasion pour créer des associations officielles et émettre avec autorisations administratives.
Le 22 juillet 1982, une nouvelle loi permit d’éclaircir la situation… plus de 1 000 projets de radios libres se lancèrent en France. Dans le même temps à Radio Provisoire, au vu du nombre croissant de personnes désireuses de poursuivre l’expérience radiophonique, il fut décidé de s’installer dans un local pour pouvoir émettre quotidiennement. Ce local était situé au 26 boulevard des Dames et n’était certes pas ce qu’il y avait de mieux : une seule porte, des toilettes à l’extérieur et une fenêtre donnant sur une cour intérieure. Un local où on souffrait de la chaleur l’été et où on gelait l’hiver. Comme unique matériel technique , nous avions deux platines vinyles, deux platines cassettes, deux micros et une table de mixage constituée de différentes pièces. Cette première table de mixage créé par un bénévole qui s’y connaissait bien en électronique a tenu a au moins une dizaine d’années. Bref, c’est à partir de faibles moyens que s’est constitué ce qui allait devenir radio Galère. Et c’est aussi dans cette période que la radio a commencer à se structurer plus officiellement en se constituant en association loi 1901.
À cette époque, on pouvait écouter des émissions régulières comme « Contes de la Folie ordinaire », « Provisoires Infos », « L’Antenne est ouverte », « Athés-souhaits » (remplacé par la suite par « Tirons la chasse »), « Doucement les basses », « Ce n’est pas mes idées, mais celles de mes copains », « Shake somme Action » et « Parloirs libres » une émission où les proches des détenu·e·s aux Beaumettes s’adressaient directement aux personnes incarcérées.
Un provisoire devenu une Galère
La libéralisation des ondes ne signifiait pas pour autant la libéralisation d’une parole autonome. La fin du monopole d’État a provoqué l’arrivée sur les ondes FM d’une multitude de radios toutes différentes les unes des autres dont certaines avaient des ambitions avant tout commerciales. Conscientes du danger d’être écrasé sous le poids de ces nouvelles radios commerciales, les radios associatives se regroupèrent pour défendre le droit à leur existence. La haute autorité de l’audiovisuel avait l’intention de faire le ménage de la bande FM en « invitant différentes radios à se regrouper ». Elle proposa de regrouper Radio Provisoire avec Radio Gazelle. Or les deux radios ne tenaient pas à ce mariage forcé. Le projet de Radio Gazelle à cette époque était de promouvoir la parole des différentes communautés vivant dans la citée phocéenne sans dimension militante. Celui de Radio Provisoire était avant tout « de donner la parole à celles et ceux qui ne l’ont pas (ou rarement) ». Radio Provisoire se voulait une radio militante au service des différentes causes humanistes tant locale qu’internationale. La fusion proposée avec Radio Gazelle par le CSA n’eut pas lieu.
Par contre, sur les ondes marseillaises existait deux autres petites radios qui partageaient des idéaux proche : Radio Soleil Provence et Radio Treize. Elles ont fusionnées avec Radio Provisoire en octobre 1984 pour devenir Radio Galère « la radio qui rame à contre-courant ». C’est à ce moment-là que fût élaborée une charte défend des principes antiraciste, antifasciste, féministe, écologiste, antivalidiste.
Et vogue la Galère du vieux port à la Friche Belle de Mai
En 1985 fût décidé de quitter le local peu commode du Boulevard des Dame. Radio Galère s’installa à proximité du Vieux Port rue de la Coutellerie. C’était un ancien appartement transformé en bureau. Avec une armée de bénévoles, nous avons pu transformer ce local en véritable studio radio : une petite pièce en régie technique, un ancien salon en studio et surtout une autre pièce en bureau. Ce changement de lieu rendait le travail plus agréable aussi bien pour les animateur·ice·s que pour les salarié·e·s.
Regroupées en Confédération Nationale des Radio Libres (CNRL) – qui a repris la charte de Radio Galère – les radios libres ont pu, à force de lobbying et discussion avec différents élus, obtenir le fait de bénéficier de subventions diverses afin de pouvoir vivre sans dépendre des puissances financières privées.
L’objectif de Radio Galère est resté le même : poursuivre les luttes contre les extrémistes de droite, la défense des minorités et à toujours donner la parole à celles et ceux qui peinent à se faire entendre. Les années 80 sont marquées à Marseille, comme dans le reste de la France, par la montée du Front National, le racisme. En 1986, les élections législatives ramènent la droite au pouvoir et les expulsions des personnes étrangères augmentent. C’est aussi l’année où se multiplie le combat des « sans » : les « sans papier », les « sans logis », les « sans travail »…
En 1992 la radio a déménagé dans la rue de la bibliothèque dans un local plus grand – avec un jardin – tout proche du quartier de la Plaine. L’objectif était de faire, en plus de la radio, un lieu de vie. Outre des studios – situés au sous-sol – la radio possédait une grande salle qui pouvait servir de salle de réunion mais aussi d’exposition. En 1993, pour les 10 ans de « La marche des Beurs », radio Galère organisa une exposition appelée « Arabicides » qui eut un écho retentissant. Malheureusement notre ambition était trop forte par rapport aux moyens du bord. La salle d’exposition demandait trop de travail aux salarié·e·s. Du plus les frais de gestion et plus particulièrement le loyer mettait en danger les finances de la Radio.
En 1998, la radio décida de déménager à la Friche de la Belle de Mai où se trouvait déjà Radio Grenouille. Les locaux était plus petits mais la gestion de la friche était à l’époque réalisée par les résident·e·s. C’est à ce moment là que se sont multipliés les directs. Direct dans les quartiers comme l’émission régulière « Mam’ Méga à la Buisserine ». Que ce soit à Saint Antoine, au collège Clair Soleil, à Saint Marcel, à la Bricarde, aux Néréides, à l’Estaque et dans bien d’autres quartiers. La radio se déplaçait sur place avec son plateau mobile pour donner la parole aux habitant·e·s, pour connaître leur vécu, leur problématique …
Les directs et les reportages ne se limitaient pas que sur Marseille. Ils se multipliaient aussi sur Vitrolles dont la mairie était tombée en 1997 sous la coupe du Front National (ainsi que Marignane, Toulon et Orange). Radio Galère n’a pas hésité à se trouver en première ligne sur le front diffusant ses reportages non seulement sur ses ondes mais aussi en les faisant diffuser dans toute la France à travers les radios associatives dont Fréquences Paris Pluriel.
La galère au milieu des zones de turbulence ou comment rebondir ?
Au milieu de l’année 2004, un certain Sarkozy Nicolas devint ministre des l’Économie et des Finances. Le Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique gérée conjointement par le ministère de la culture et celui du budget subit une coupe drastique. Il faut tout de même préciser que cette rigueur budgétaire a touché l’ensemble du monde associatif (qui fait appel aux subventions pour exécuter ses missions de lien social essentielles à la vie de la cité). Commença alors une entrée en zone de turbulence pour l’association Galère, qui gère la radio de même nom. Les dirigeants bénévoles de la radio ont initié, en collaboration avec d’autres acteur·ice·s associatifs de la scène marseillaise plusieurs actions en direction des pouvoirs publics mais également vers l’opinion publique pour alerter sur le risque de disparition totale de la vie associative de la cité si de telles coupes budgétaires venaient à se pérenniser.
Radio Galère fut même à l’initiative d’une manifestation régionale devant la Préfecture des Bouches du Rhône. Rien n’y fait. Les quelques rallonges budgétaires glanées auprès de quelques collectivités locales n’ont jamais pu combler les manques à gagner, essentiels pour maintenir un niveau d’emploi indispensable à la continuité radiophonique. Ce fut alors le gel des recrutements au sein de la radio et même des ruptures conventionnelles temporaires des quelques emplois CDI pour leur éviter une cessation pure et simple du paiement de leur salaire. Ces difficultés persistantes nous obligèrent à lancer une réflexion sur la manière de se sortir du bourbier. Plusieurs initiatives furent mises en place telles des rencontres débats repas organisées ça et là hors les murs de Galère. Même si quelques euros furent gagnés à l’issue de ces actions, les difficultés de trésorerie continuèrent de gréver dangereusement la santé financière de la radio.
Et c’est en automne 2010 qu’un groupe de jeunes étudiant·e·s en Master de l’Université d’Aix s’est présenté devant le Conseil d’Administration de la radio pour nous proposer un projet de festival musical à réaliser en lien avec la radio, c’était leur projet de fin d’étude. Nous avons évidemment accepté. À ce groupe s’est adjoint par la suite des animatrices et animateurs d’émissions pour réfléchir collectivement au projet. Au fil des rencontres de travail régulières, nous sommes passés d’un simple festival musical à quelque chose de beaucoup plus ambitieux. La création d’un événement de rentrée à Marseille autour de radio Galère et de ce qu’elle représente sur la scène militante marseillaise. Le festival « Parole de Galère » venait de voir le jour.
La première édition a eu lieu au tout début septembre 2011. Décliné sur deux jours, ce fut un mélange de scènes musicales reflétant la diversité des genres musicaux présent sur nos ondes. En parallèle, il y eu des rencontres débat sur deux jours avec des thématiques tant locales et nationales qu’internationales. Il y avait des séances d’écoute de reportages qu’une équipe avait sélectionné pour l’occasion. Le succès rencontré par l’événement encouragea beaucoup de personnes à nous rejoindre pour préparer la 2ème édition qui eu lieu en septembre 2012. La 3ème édition a eu lieu en septembre 2013 et fut organisée dans le quartier de la Busserine dans le 14ème arrondissement. Elle fut moins réussie que les précédentes. Les raisons du demi échecs sont essentiellement dues au manque d’ancrage durable dans ce quartier.
Des ateliers radios ont continués tous au long des années afin que les personnes marginalisées porte leur voix sur nos ondes. Il est primordial que cette radio représente les minorisé.e.s, les laissé.e.s pour compte, les personnes en rétentions dans les lieux d’enfermements.
En 2022, eu lieu une troisième édition du festival Parole de Galère sur une journée afin de fêter les 40 ans de la radio.
Des apérosmixs sont organisés régulièrement par les bénévoles et l’équipe salariée. Des soirées où les animateur.ice.s des différentes émissions se rencontrent et se retrouvent par le plaisir de faire la fête.
