Le Ravi, 2003-2022, journal régional d’enquêtes et de satire, siège de La Tchatche

11 Boulevard National, 13001 Marseille
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Le Ravi, 2003-2022, journal régional d’enquêtes et de satire, siège de La Tchatche
Arrondissement : 1er
Site Internet : facebook.com/leravi.org/

Le Ravi est un journal mensuel fondé en 2003 dont l’aventure s’est terminée par un dépôt de bilan en septembre 2022. Il examinait la vie politique, sociale, culturelle, et l’actualité de la région Sud. Tiré à 5000 exemplaires, il mélangeait enquêtes et satire, articles et dessins. Le dessin de presse et la caricature y tenait une part importante, tandis que les journalistes de l’équipe scrutaient l’actualité locale. Journal indépendant, acteur du monde de l’économie sociale et solidaire, et premier journal en France à se revendiquer du Slow Media, Le Ravi, édité par l’association « La Tchatche » était basé dans des appartements de l’ancienne Usine Picon, Bd National à Marseille. Il paraissait chaque premier vendredi du mois et s’achetait en kiosque (sur toute la région) ou par abonnement.

Le mensuel, illustré par des dessins de presse, organisait ses pages selon un rubriquage en cinq grandes parties: « Les enquêtes » (actualité de la région), « La grosse enquête » (le dossier du mois), « RTT » (culture, gastronomie,…), « La vie de la Tchatche » (sur les différentes actions du journal en lien avec la société) et « Reportages ».  Le journal jouait avec les codes plus traditionnels de la presse. Chaque mois, une personnalité, le plus souvent politique, se voyait décerné dans l’esprit de la « noix d’honneur » du Canard enchaîné un « Ravi de plâtre » plus horrifique qu’honorifique.

Le journal proposait également un portrait satirique « Poids lourd », basé sur les déclarations publiques d’une personnalité de la région, considérée par le journal, en « surpoids médiatique ». S’ajoutaent les reportages dessinés, les strips récurrents des dessinateurs du journal, la recette de cuisine du mois, un reportage dessiné…

Acteur du monde de l’économie sociale et solidaire, Le Ravi proposait chaque mois à ses lecteurs un agenda des différentes manifestations à venir.

La Grosse enquête

Tous les mois, un dossier (la « grosse enquête ») proposait de prendre un peu plus de temps pour plonger dans un sujet. Il pouvait s’agir d’un sujet général, toujours traité sur l’angle de la région Sud (Nucléaire : non ou merci ?, la Bataille de l’eau, À quoi servent les sénateurs, l’hyper-consommation…), d’un reportage (Dans la gueule de l’extrême droite, Veolia connection, JC Decaux Roi du macadam,…) ou d’un dossier consacré à une ville de la région.

Illustrées par les dessinateurs qui travaillaient pour le journal, ces enquêtes s’appuyaient également sur les tribunes, proposées par le journal aux acteurs de la société dans la région. C’est autour de ces enquêtes qu’étaient généralement montés les débats proposés par le journal.

Les enquêtes

Chaque mois, le journal proposait à ses lecteurs plusieurs pages d’enquêtes sur la région. Ces enquêtes étaient toujours locales, mais remises en perspective avec les problématiques nationales : Le Ravi voulait promouvoir un journalisme de circuit court, avec en objectif le localisme de la presse et de l’information. Le mensuel publie, entre 2011 et 2014, un palmarès exclusif des «villes à fuir», qui classe les villes de la région Sud à partir d’indicateurs sélectionnés ; le journal revendique qu’«un classement, quel qu’il soit, ne fait jamais que refléter les idées (explicites ou non) de ses concepteurs».

Les reportages

Parce que Le Ravi voulait promouvoir le droit de la presse de prendre le temps d’analyser et de regarder la société, il laissait une grande part, chaque mois, aux reportages.

Le Contrôle technique de la démocratie

Chaque mois, sur une page entière, le Ravi proposait une plongée dans la démocratie locale : un journaliste, incognito, se rendait dans une enceinte de la démocratie et en rapportait les faits marquants. C’est le plus souvent un Conseil Municipal d’une ville ou d’un village de la Région, mais cela pouvait être l’assemblée d’un Conseil Général ou d’une intercommunalité.

Le reportage dessiné

Trois pages étaient consacrées, en fin de journal, à un reportage dessiné : c’était une spécialité du journal que cet exercice qui, tous les mois, entraînait le lecteur, au moyen d’une bande dessinée scénarisée comme un reportage de journaliste, sur un sujet d’actualité de la région. Le journal organisait également des débats entre les acteurs de la vie publique de la Région. Objectif : faire parler, en public, de la gestion de l’eau ou du nucléaire, de la culture ou de l’agriculture, de l’extrême-droite ou de l’économie sociale et solidaire, à Marseille, Aix-en-Provence, Avignon, Correns ou Manosque, c’est plus de deux fois par mois que les journalistes du Ravi allaient ainsi à la rencontre du public. Par ailleurs, tous les mois, en collaboration avec la radio associative locale Radio Grenouille, les journalistes du Ravi interviewaient un(e) responsable politique de la région dans le cadre de l’émission « la Grande Tchatche ».

Le dernier article du ravi issu de son site internet (plus en ligne)

Le Ravi baisse les bras septembre 2022 | PAR La Tchatche, le Ravi Dépôt de bilan, liquidation… : c’est terminé pour le journal pas pareil. Fini de rire ! Face au mur de l’argent, on se lève et on s’en va. Mais sans renoncer à fêter la satire et la presse libre.

Garder les bras levés durant 18 années, contre vents et marées, forcément, ça donne souvent des crampes. Les appels à l’aide répétés du Ravi pour poursuivre sa singulière aventure éditoriale sont presque devenus, au fil des saisons, un gag récurrent. Mais cette fois-ci c’est tristement officiel : de guerre lasse, le mensuel régional pas pareil baisse bel et bien les bras.

Le numéro 208, daté juillet-août, sera donc le dernier. L’association la Tchatche, qui édite le journal et mène en Provence-Alpes-Côte d’Azur des projets de journalisme participatif et d’éducation aux médias, est en cessation de paiement, dans l’incapacité de payer ses salariés, ses charges et ses prestataires. Elle vient de déposer le bilan. Le tribunal de Marseille devrait prononcer rapidement une liquidation. Fini de rire !

Lâchage total

Pour celles et ceux qui suivent de près les péripéties du journal satirique, c’est à peine une surprise. En juillet, suite à notre assemblée générale, (cf « le Ravi en péril »), nous documentions une fois de plus la situation en rembobinant le film : des ventes en hausse suite à une transition numérique réussie mais toujours insuffisantes, le dynamisme jamais démenti des actions d’éducation populaire, un autofinancement exceptionnel à hauteur de 80 %, par contre le lâchage total, en 2021, des collectivités locales creusant des fonds associatifs négatifs.

En cette rentrée 2022, les portes du Conseil régional et du Conseil départemental, présidés par Renaud Muselier et Martine Vassal (ex-LR, devenus majorité présidentielle), restent fermées : un choix délibéré qui jette un doute sur la sincérité des discours proclamant l’amour pour le pluralisme de la presse et la caricature, de la part d’élus auto-proclamés « progressistes » et « remparts » face aux dangers de l’extrême droite.

De son côté, la ville de Marseille (Printemps marseillais, PS, PCF, EELV…) a voté en juin une aide à nos actions éducatives. Un geste significatif, couplé à l’achat d’une campagne estivale de pub, mais trop tardif (toujours zéro euro dans nos caisses !) et, surtout, insuffisant pour changer la donne faute d’une réelle politique pérenne et transparente d’aide aux médias indépendants.

Et voilà, pour ne rien arranger, que l’État façon Macron, pourtant très généreux pour les milliardaires qui possèdent les « grands » médias, repousse de plusieurs semaines l’examen annuel des demandes au guichet de son modeste Fonds de soutien à l’information sociale de proximité. Au même moment, Rodolphe Saadé, le patron de la multinationale CMA-CGM, par ailleurs le plus grand employeur privé de Marseille, met la main sur le quotidien La Provence

« Ravilution » entravée

Dans ce contexte, nos fondamentaux éditoriaux sont devenus de plus en lourds à porter : régional mais sans parvenir à être diffusé partout en Paca, investigation mais avec des moyens limités, politique (avec ou sans majuscule) dans une période où le mot même peut donner des boutons, satirique à une époque où la caricature est un terrain miné et où tout invite à pleurer plutôt qu’à se marrer…

La petite équipe salariée sous dimensionnée, contrainte de se partager entre journalisme et actions éducatives, a frôlé à plusieurs reprises le burn out. Trop occupés en permanence à survivre, nous n’avons pas su féminiser et rajeunir la rédaction comme nous le souhaitions. Ni mener à terme tous nos chantiers, comme le numérique, afin de compenser l’érosion des ventes dans un réseau presse moribond.

Le formidable « SOS Ravi », ayant réuni 65 000 euros entre mars et mai, nous a permis de survivre… quelques mois. Mais faute d’atteindre l’objectif initial de 100 000 euros, nous n’avons pas réussi à financer l’élan nécessaire à une « Ravilution » éditoriale adossée à un modèle économique apuré et durable. Et hors de question, pour nous, d’appeler à nouveau à l’aide auprès de nos lecteurs frappés eux aussi de plein fouet par la crise…

C’est donc la fin d’une histoire débutée en 2003 ! Pour les six salariés de la Tchatche, aucun problème : comme pour tous les chômeurs, il leur suffira de traverser la rue afin de trouver un travail. Pour l’offre médiatique régionale, déjà étriquée, c’est ballot : elle s’appauvrit encore un peu plus avec la disparition d’un des très rares journaux mêlant enquête et satire en France…

Satire toujours

Alors une dernière fois, avant de tirer notre révérence, un immense merci aux lectrices, lecteurs, abonné.e.s depuis toujours ou compagnes et compagnons de route le temps d’un numéro, ayant osé s’aventurer à nos côtés depuis deux décennies sur des chemins de traverse loin des autoroutes de l’information standardisées. Spéciale dédicace aux donatrices et donateurs lors des « Couscous bang bang » et autres levées de fonds qui ont permis, tant de fois, de faire durer l’impossible.

Salut confraternel aux nombreux partenaires de la presse pas pareille, de l’éducation populaire, des collectifs citoyens et associatifs, de l’économie solidaire et de l’action sociale, des fondations, avec lesquels nous avons cheminé. Bravo sincère aux rares acteurs politiques convaincus que l’information est un bien public précieux qu’il faut sortir de la seule logique de marché en finançant sans contrepartie son indépendance…

Et chapeau aux bénévoles, au premier rang desquels les administratrices et administrateurs de la Tchatche qui se sont succédé depuis 19 années, sans l’engagement desquels ce journal n’aurait jamais existé !

Soyons clairs : face au mur de l’argent, on quitte la table, mais sans renoncer à la satire et la presse pas pareille. Face aux pressions politiques et économiques, face aux procès bâillons, nous revendiquons plus que jamais le droit à la satire, à l’irrévérence, au ricanement salutaire des dessinateurs de presse.

Nous défendons toujours la pratique d’un journalisme d’investigation, sans concession, l’utilité d’une presse citoyenne impliquée au plus près de celles et ceux qui n’ont pas la parole. A fortiori dans une région, en Paca, où un député sur deux est désormais membre du RN, parti dont le racisme est le seul véritable programme !

Ici et ailleurs, alors que les ravages sociaux et écologiques s’aggravent dans un monde dominé par les inégalités et les logiques financières, une presse libre reste essentielle. L’association la Tchatche disparaît et le journal le Ravi baisse les bras. D’autres, dont de nombreux “ravis”, les lèveront à nouveau…

Les salarié.e.s ainsi que les administratrices et administrateurs de la Tchatche et du Ravi


SOURCES Wikipedia Le raviLe Ravi
PHOTOS Le Ravi (illustrations de Lacombe, Yakana…)
A NOTER Ce site est un blog personnel, ces informations sont données à titre indicatif et son mises à jour aussi souvent que possible. N’hésitez pas à me contacter pour toute correction ou contribution

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