Fissiaux, de Centre Pénitentiaire à Centre de Loisirs

2 Avenue du Maréchal Foch, 13004 Marseille
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De nos jours au 2 Avenue du Maréchal Foch, au sein du centre Fissiaux, les enfants pratiquent le judo, la danse ou encore du théâtre…difficile de se douter que c’est exactement ici que se trouvait un pénitencier pour garçons, où est mort son créateur le 3 décembre 1867, l’abbé Fissiaux, surnommé « l’apôtre de la jeunesse ». Ce philanthrope était l’instigateur et le directeur de plusieurs orphelinats, pénitenciers et maisons d’éducation…il sera salué pour son action tout en suscitant la polémique sur les conditions de vie et de travail forcé de ses jeunes protégés contrastant aussi avec le luxe de la décoration de certaines de ses réalisations et son nouveau statut de notable.  

L’orphelinat du Choléra

Né à Aix-en-Provence le 26 juillet 1806, Charles-Marie-Joseph Fissiaux  réalise ses études au collège des jésuites d’Aix puis au grand séminaire. Il porte déjà un grand intérêt aux enfants s’occupant également de l’Œuvre de jeunesse fondée en 1801 à Marseille par l’abbé Allemand et toujours existante de nos jours, rue Saint-Savournin. Fissiaux est ordonné prêtre en 1831 et nommé vicaire à Marseille des églises Saint-Ferréol puis Saint-Vincent-de-Paul.  En 1835 il s’est démis de ses fonctions pour se consacrer à l’enfance abandonnée et délinquante et prendra la direction jusqu’à sa mort en 1867 de l’Œuvre des orphelines du choléra installée par l’évêque Mazenod sur les hauteurs de la colline Saint-Charles. En parallèle l’abbé se lance dans la création de pénitenciers destinés à recevoir des adolescents prévenus ou condamnés par la justice à des peines légères, ainsi que d’autres qui y sont placés par mesure de correction paternelle. Grâce à un prêt de l’État, l’abbé Fissiaux achète en 1839 à l’extrémité du chemin de la Madeleine (aujourd’hui boulevard de la Libération), deux propriétés sur lesquelles il bâtit un pénitencier qui hébergera jusqu’à 200 garçons.

Deux ans plus tard, à proximité, il installe dans un établissement de 70 places, les filles détenues dans un bâtiment construit à cet effet au quartier Saint-Charles, face à l’orphelinat des Dames de la Providence.

Bagne de Mettray près de Tours qui inspira l’abbé Fissiaux pour ses pénitenciers agricoles à Marseille

A partir de 1840 l’abbé instaure une méthode de réinsertion ayant fait ses preuves à Mettray près de Tours (voir onglet vidéo)…dans un espace sans murailles, les jeunes sont rééduqués par la religion et la pratique des travaux agricoles. L’abbé Fissiaux met en pratique ces principes à Saint-Pierre, où il dispose de grands jardins…on dénommera ce site le Pénitencier agricole et industriel de Marseille. Après 1853 il développe ces colonies agricoles pénitentiaires avec l’ouverture, pour 400 garçons, de Beaurecueil, dans la région aixoise, sur un domaine de 91 hectares. L’année suivante il achète un autre domaine de 55 hectares à La Bastide-des-Jourdans, dans le Vaucluse. En 1860, l’abbé Fissiaux ouvre un premier orphelinat pour garçons, à Ligny, dans la Meuse, et l’année suivante un second à l’île Saint-Honorat, au large de Cannes. Après leur fermeture, les pénitenciers Saint-Pierre et Beaurecueil seront aussi transformés en orphelinats, l’un à vocation de travail agricole, l’autre industriel. Parallèlement, l’abbé s’intéresse aussi à l’éducation des jeunes bourgeoises, futures protectrices de ses orphelines et détenues.

Il fonde ainsi en 1854 un pensionnat à Marseille. D’abord installé rue Saint-Savournin, il déménagera cinq ans plus tard dans le bâtiment de Saint-Joseph-de-la-Madeleine devenu aujourd’hui une école privée catholique mixte (primaire, collège, lycée).

Saint-Joseph-de-la-Madeleine, 172 Bis boulevard de la Libération

Les orphelinats et pénitenciers de l’Abbé servaient à réinsérer moralement les garçons par la religion et par le travail pour ensuite les insérer dans la vie professionnelle. Pour les filles de l’orphelinat, l’objectif était « de former des mères de famille chrétiennes, des servantes dévouées aux intérêts de leurs maîtres ou des ouvrières consciencieuses ». L’abbé devient alors un notable reconnu, décoré de la Légion d’honneur acquise au titre de l’agriculture grâce à sa passion pour l’agronomie. A sa mort on évoquera l’agronome de talent multi-récompensé et son action au services des jeunes orphelins et délinquants. Mais son décès s’accompagnera également de critiques sur l’utilisation d’une main-d’œuvre gratuite et les conditions très difficiles de vie et de travail de ces enfants contrastant avec certaines constructions jugées trop luxueuses. Le pénitencier Sainte-Madeleine qui, de l’avis des autorités, « laisse à désirer à tous points de vue » est le premier à être supprimé en 1862. Après le décès de l’abbé, d’autres suivront.

Aujourd’hui, au delà du centre de loisirs Fissiaux, une impasse toute proche porte également le nom de l’abbé.


SOURCES Enfant au Travail par Éliane Richard  & data.bnf.fr
PHOTOS Centre Fissiaux & Ecole Saint-Joseph-de-la-Madeleine & Archives non créditées
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